Eugène de Mazenod et Saint-Laurent du Verdon

En septembre 1818, saint Eugène de Mazenod se retira avec deux de ses compagnons dans la bastide familiale de Saint-Laurent du Verdon pour y rédiger la première Règle de vie de la Société des Missionnaires de Provence, qu’il avait fondée à Aix-en-Provence deux ans plus tôt avec un petit groupe de prêtres et qui, en 1826, prendrait le nom de Congrégation des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée.

Photo 2

La bâtisse a été construite entre 1600 et 1610. Elle est entourée d’une propriété rurale d’un peu plus de trois cents hectares d’un seul tenant, achetée par Alexandre Mazenod aux coseigneurs de Saint-Laurent grâce au don de sa sœur Jeanne, qui avait elle-même hérité de son mari décédé en 1730. Charles-Alexandre Mazenod, grand-père du Fondateur, obtint par lettres royales du 10 février 1741 une charge de président à la Cour des comptes, aides et finances de Provence. Il devint ainsi membre de la noblesse de robe. Monsieur de Mazenod est donc reconnu comme noble fieffé, c’est-à-dire un noble dont le titre est rattaché à un territoire : il est seigneur de Saint-Laurent ; en d’autres termes, Saint-Laurent est le titre de noblesse de Charles-Alexandre de Mazenod.

Après la Révolution, Mme Joannis-Bonnet, belle-mère de monsieur de Mazenod, réussit à récupérer cette propriété, annexée par le gouvernement de la Révolution comme avaient été confisqués tous les domaines des nobles.

En 1802, quand Eugène revient de l’exil auquel il a été contraint par la Révolution de 1789, alors qu’il était âgé de 9 ans, il ne peut pas immédiatement jouir des charmes de la ville d’Aix, car il est menacé par le service militaire. La conscription se faisant par tirage au sort, il quitte Aix-en-Provence et va se faire oublier à Saint-Laurent ; lieu de résidence où il passe cinq mois, lui permettant de trouver un remplaçant à moindre prix et d’échapper ainsi au service militaire. C’est pour lui un temps d’ennui très pesant après la vie mondaine qu’il avait menée en Sicile.

Après plusieurs années d’interrogation, de recherche d’un avenir, Eugène de Mazenod va entendre un appel à se mettre totalement au service de l’Eglise de France, très en souffrance après la Révolution. Il entre au séminaire de Saint-Sulpice à Paris. Après avoir été ordonné prêtre, il revient à Aix-en-Provence, sa ville natale, et se met au service des pauvres, des petits, des abandonnés (paysans des campagnes, prisonniers, domestiques, jeunes). Devant l’énormité de la tâche, il réunit quelques prêtres du diocèse d’Aix et Fréjus et fonde, en 1816, une association qui va prendre le nom de « Missionnaires de Provence ». Deux ans plus tard, l’association accueillant des jeunes et s’étendant en dehors de la Provence, Eugène de Mazenod éprouve le besoin d’écrire une Règle de vie pour maintenir l’esprit et l’unité de ce groupe de missionnaires.

Photo 3

C’est dans ce but qu’il va faire retraite dans la propriété familiale de Saint-Laurent et, du 1er au 16 septembre 1818, accompagné de Noël François Moreau et Marius Suzanne, il va rédiger la première Règle des Missionnaires de Provence.

Même s’il apprécie le calme de Saint-Laurent, Eugène de Mazenod pense que sa famille doit se séparer de cette propriété. Et cependant, il garde un attachement certain pour ce domaine : évêque de Marseille, il contribuera au financement de la restauration de l’église paroissiale, comme le rappelle une plaque posée sur un mur de l’église.

« Cette maison est passée dans les mains de propriétaires différents. Nous en gardons un double souvenir, celui de la gloriole humaine de la famille Mazenod, qui ne dura pas, et le souvenir du recueillement de saint Eugène qui, dans le silence de cette campagne, a conçu la première Règle. Depuis cette époque, cette Règle anime le zèle missionnaire des Oblats » – écrit le Père René Motte.